Architectes : pourquoi avoir recours au réemploi ?
Le secteur de la construction contribue à 23% de la pollution atmosphérique et 50% de déchets mis en décharge. Dans la démarche globale de sobriété environnementale dans laquelle nous sommes tous engagés, le réemploi de matériaux, dont les bénéfices environnementaux sont nombreux, devrait devenir une évidence pour les architectes. En effet, il ne s’agit plus uniquement d’une alternative financière pour répondre aux demandes de construction à petit budget : l'économie circulaire s'inscrit dans une démarche environnementale globale.
Nous faisons le point dans cet article sur le réemploi des matériaux et les nombreux avantages de cette démarche pour l’architecture.
Différences entre réemploi, réutilisation et recyclage
Commençons par mettre au clair chacune de ces pratiques. Devenues décisives dans le secteur du bâtiment, elles sont définies dans l’article L541-1-1 du Code de l’environnement.
Réemploi de matériaux
À l’issue d’un chantier, tous les matériaux (substances, matières ou produits) non utilisés et qui ne sont pas des déchets doivent être valorisés (au lieu d’être envoyés à la déchetterie).
Le principe du réemploi est d’utiliser, pour un usage identique à celui pour lequel ils avaient été conçus, les matériaux récupérés une fois un chantier terminé.
Réutilisation des déchets
La réutilisation est née du constat que la déconstruction de bâtiments ne valorise pas suffisamment les matériaux récupérés en fin de chantier.
La réutilisation vise à utiliser de nouveau les matériaux (substances, matières ou produits) qui sont devenus des déchets, après une étape de réhabilitation appelée "préparation en vue de la réutilisation".
Recyclage en fin de chantier
Le recyclage est l’opération de valorisation par laquelle les déchets sont transformés pour fabriquer un nouveau produit. Ainsi, si les matériaux de fin de chantier ne peuvent pas être réemployés ou réutilisés sous d’autres formes, ils sont recyclés.
Les avantages du réemploi de matériaux dans l’architecture
De ces trois solutions, le réemploi est la seule qui n'implique pas le passage du produit par le stade de déchet. Elle est donc à privilégier, car comme le produit ne subit aucune transformation, cette démarche est la moins coûteuse en ressources.
Si pendant très longtemps, la société a considéré que le réemploi de matériaux n’était nécessaire uniquement sur les chantiers à faible budget, cette solution gagnerait à être adoptée bien plus largement dans le secteur de l'architecture.
Il est vrai que l’un des avantages du réemploi est d’acheter des matériaux de qualité à prix réduit.
Mais outre l’intérêt financier, ce sont aussi les enjeux environnementaux qui nous obligent à repenser notre mode de consommation, y compris dans l’architecture et la construction. Ainsi, réemployer un matériau destiné à la benne permet de réduire les déchets liés à sa destruction et à la fabrication d'un nouveau produit.
D’autre part, la préservation des ressources naturelles nécessaires à la construction est devenue une obligation depuis plusieurs années. En effet, certaines ressources se tarissent (eau, pétrole…). Si nous ne modifions pas nos pratiques dès maintenant, c’est la rareté (voire la disparition) de ces ressources qui nous y forcera dans un futur proche…
Enfin, dans une époque où construire et consommer à outrance de nouveaux matériaux perd de son sens aux yeux des consom'acteurs, les achats réfléchis et respectueux de l’environnement prennent le pas sur la consommation traditionnelle ; y compris quand il s’agit de construction, de réhabilitation, de rénovation ou de déconstruction.
Des projets architecturaux à base de réemploi de matériaux
Quand on parle de projets architecturaux, on imagine tout de suite un bâtiment d'envergure. Or, un projet mené par un architecte concerne aussi bien des bâtiments modernes (habitation, commerce, école…) que des musées ou des églises. Peu importe l’objet et la taille de la construction, le réemploi de matériaux peut trouver sa place.
Ainsi, les architectes se tournent de plus en plus vers le réemploi pour :
faire une toiture avec des tuiles plates en terre cuite
remplacer des volets en PVC
installer un plancher en bois brut
remplacer une fenêtre de toit
changer les équipements dans une cuisine
refaire une salle de bain complète
remplacer tout simplement une porte
mais aussi :
récupérer des dalles de béton pour construire un nouveau commerce
embellir la façade d’une école avec un bardage récupéré d’un centre commercial
construire un bar moderne 100% à base de matériaux réemployés
rénover une salle des fêtes avec des briques récupérées d’une déconstruction
construire un musée du miroir avec des fenêtres provenant de vieux bâtiments
monter des entrepôts avec des matériaux non utilisés sur un autre chantier
etc
Tout devient possible rapidement et à moindre coût grâce au réemploi. Les seules contraintes des architectes sont de s'assurer :
de l’état des matériaux réemployés
du respect des normes de sécurité
du respect des contraintes techniques structurelles
de la qualité finie de la construction
de sa longévité au regard des standards de construction en vigueur
Le réemploi de matériaux de fin de chantier n’est plus un usage marginal comme par le passé. Ainsi, les cabinets d’architecte se tournent, eux aussi, vers cette pratique.
En plus des avantages financiers et environnementaux, c’est aussi une prise de conscience de la richesse de l’existant qui permet à tous les acteurs du secteur du bâtiment de recréer un tissu local fort et engagé, riche en opportunités.